Étude Grand Ouest
L'effet céréales fait plonger les résultats en 2024
Avec des résultats courants divisés par 2 en 2024 par rapport à la bonne année 2023, quasiment toutes les productions agricoles de la région dévissent vers le bas.
Avec des résultats courants divisés par 2 en 2024 par rapport à la bonne année 2023, quasiment toutes les productions agricoles de la région dévissent vers le bas.



Ça n'est pas une énorme surprise, on s'y attendait, mais les chiffres issus des comptabilités agricoles des 8 AGC* Grand Ouest du réseau Accompagnement Stratégie confirment que l'année 2024 n'a pas été à la hauteur des deux années précédentes, qui avaient permis de remettre l'agriculture sur de bons rails. "Si on regarde en macro, les mauvais résultats en céréales et l'augmentation des charges ont plombé tout le monde" analyse le président de la Chambre d'agriculture de la Sarthe, Philippe Dutertre. Et avec la tendance à la "végétalisation" de notre agriculture, beaucoup glissent vers le bas de l'échelle des revenus : l'étude montre en effet qu'un agriculteur sur deux a dégagé moins d'un Smic net (15 000 €) en 2024 et un tiers se retrouve même dans le négatif. "S'il faut toujours rester modeste dans l'analyse collective, chaque cas étant par nature particulier, reconnait le président d' AS CEFIGA, Dominique Defay, l'effet ciseaux dans la filière végétale avec des prix et des volumes en berne et des charges en hausse, explique une grande partie du recul dans bon nombre de systèmes de production. Ainsi par exemple dans le groupe lait, le chiffre d'affaires lait a augmenté en moyenne de +15 000 € par UTA avec la hausse du prix du lait, mais cette bonne performance a été gommée pour moitié par la perte de chiffre d'affaires sur les cultures de vente". Le phénomène est analogue en viande bovine, quoiqu'un peu moins marqué.
A cela s'ajoute l'effet rattrapage des bonnes années antérieures, qui a engendré en 2024 des hausses de cotisations MSA, "beaucoup étant en moyenne triennale". Et ce sans compter l'augmentation du coût de la main d'œuvre, des fermages, des charges financières, et bien sûr, des coûts d'achats et d'entretien du matériel et des bâtiments. "C'est simple, entre l'avant Covid et aujourd'hui, les charges ont augmenté de 25 % en moyenne" calcule Dominique Defay. Philippe Dutertre pointe aussi de son côté "l'effet des investissements réalisés notamment en élevages porcins, laitiers et bovins viande, et permis par l'embellie des marchés ces dernières années", des investissements jugés "nécessaires en termes de modernisation" mais qui pèsent forcément aujourd'hui sur les annuités. des entreprises.
Alerte sur 2025
A mi-parcours, l'année 2025 semble dans la même lignée que 2024, certes avec des moissons moins catastrophiques que l'année dernière, mais "plutôt hétérogènes". Et avec des prix de céréales qui ne décollent pas, des inquiétudes sur la disponibilité et la qualité des fourrages et des menaces sanitaires (FCO notamment), les deux responsables n'affichent pas un optimisme démesuré. "Les trésoreries sont tendues" pointe le président d'AS CEFIGA. Et si l'élevage bovin (viande et lait) affiche une plus grande sérénité en termes de prix, ça n'est malheureusement pas le cas des producteurs de volailles de chair qui restent sur des niveaux de marges relativement bas. Et ceux-ci se sont encore tassés en 2024. "La consommation intérieure de volailles ne s'est jamais aussi bien portée. La filière projette la construction de nouveaux projets. Il va donc falloir redonner du souffle aux éleveurs de volailles si la filière veut que des jeunes s'y intéressent" exhorte Philippe Dutertre.
Prudence sur les montants de reprise
Les jeunes, l'installation, c'est bien ce qui inquiète, alors qu'on a encore vu en 2024 les niveaux de capitalisation augmenter en moyenne de 8 %. Mais après ces deux années 2024 et 2025, les deux responsables appellent "à la retenue et à la prudence sur les montants de reprise". "Attention à ne pas considérer comme définitivement acquis les bons éléments de conjoncture que nous avions connus il y a 2 ans" recommande Philippe Dutertre. Un aléa climatique, des tensions géopolitiques ou un problème sanitaire peuvent vite venir tout remettre en cause. Le bon compromis consiste peut-être à prendre de la hauteur sur les chiffres et à les regarder sur un pas de temps plus long, ce qui permet de lisser les effets positifs comme négatifs et se faire une idée de la capacité d'un outil à dégager du revenu. Le président de la Chambre incite également les agriculteurs "à travailler sur la sécurisation de leur système, qu'il s'agisse d'assurance ou de constitution de stocks fourragers pour les éleveurs". Tout ce qui peut permettre de se relever de ces caps difficiles qui jonchent le parcours de tous les entrepreneurs agricoles.