Mobilisation
Les Sarthois à Bruxelles après 2015 et 1999
Dans la vie d'un militant syndical de la FDSEA de la Sarthe, monter manifester à Bruxelles n'est pas chose courante. La dernière fois c'était en 2015. Et il faut remonter à 1999 pour la précédente.
Combien seront-ils à faire le voyage le 18 décembre prochain ? La FDSEA et les JA qui viennent de lancer la mobilisation l'ignorent encore. Il y a 10 ans, en 2015, une quarantaine d'entre eux avaient fait le déplacement en bus le 7 septembre (photos d'illustration), à peine 4 jours après la grande manifestation à Paris où de nombreux Sarthois étaient carrément montés à la capitale en tracteur. A l'époque, la mobilisation, à l'échelle européenne, avait réuni 7 000 agriculteurs et 1 500 tracteurs dont un fort contingent français venu surtout du Nord et de l'Est du pays. Le monde agricole, et en particulier de l'élevage, vit alors l'une de ses plus graves crises, et les actions se multiplient depuis le début de l'été. Le mot d'ordre "Plus de prix, moins de normes" résonne alors avec la volonté de Bruxelles de poursuivre sa stratégie de baisse des prix d'intervention tout en ne cessant d'avancer sur son agenda normatif. La France, sous l'autorité de son 1er ministre Manuel Valls, est alors à la tête d'une coalition qui réclame le relèvement du prix d'intervention de la poudre et du beurre. Hypothèse écartée par Bruxelles qui se contentera d'accorder, sans convaincre, une (petite) enveloppe de crise de 500 millions d'euros à répartir entre les Etats membres, tout en appuyant néanmoins une politique de relance du stockage privé pour le porc, le fromage et la poudre de lait.
218 Sarthois à Bruxelles en 1999
Et il faut remonter plus de 25 ans en arrière, le 22 février 1999, pour voir les banderoles des agriculteurs sarthois flotter dans les rues de la capitale belge. Ils sont alors 218 à voyager dans les 4 cars affrétés par la FDSEA pour se retrouver "dans un cortège de 6 km de long" dans des conditions météo apocalyptiques entre "neige fondue, grêle ou encore violentes giboulées" rapporte la Sarthe Agricole et Rurale, l'ancêtre d'Agri72. Cela n'empêche pas les organisateurs de revendiquer entre 40 000 et 50 000 manifestants, dont quelque 20 000 Français venus protester contre ce qu'on appelle à l'époque "l'agenda 2000" de la Pac. Celui-ci prévoit, entre autres, de réduire les prix d'intervention en ne les compensant que partiellement par des aides directes, sorte de tremplin avant la fameuse réforme du "découplage des aides" mise en œuvre en 2006. Les agriculteurs dénoncent également une forme de "renationalisation de la Pac" et voient l'introduction de l'objectif de "développement rural" qui constitue globalement aujourd'hui le second pilier de la Pac, comme un écueil pour l'ambition productive européenne.
En replongeant dans ces quelques chroniques, on mesure ô combien l'histoire est un éternel recommencement, où chaque génération d'agriculteurs est appelée à se mobiliser pour défendre, au delà de son propre appareil productif, la souveraineté alimentaire, plus que jamais mise à mal, dans notre vieux continent.