Semences de ferme
Pelletier Agri Services tourne à plein régime
Dans le cadre d'une journée professionnelle nationale, le Staff (Syndicat des trieurs à façon de France) avait choisi Pelletier Agri Services, un des plus importants trieurs de la région basé à La Chapelle-Huon.




Pour présenter les atouts des entreprises de la semence de ferme indépendante, il est toujours utile de jeter d'abord un oeil dans le rétro. Et pour cela, rien de mieux que de se rapprocher de François Delaunay journaliste, éditeur et co-auteur avec Sylvain Ducroquet de Pour un grain de liberté (Ed. de l'Aulnaie), l'histoire de la profession de trieur à façon. "Elle est née dans les années 1860. Quand, après-guerre, l'industrie semencière a voulu se propager et que l'Inrae a voulu faire de la France la championne de l'agriculture scientifique, les trieurs sont devenus des emmerdeurs. Si bien que le 4 juillet 1989, le Ministère a interdit aux agriculteurs de faire appel aux prestataires de services, donc à la profession des trieurs." Mais un vent de rébellion s'est immédiatement levé avec des premières manifestations à Poitiers. "Cela a bastonné fort, dans la rue avec des blocages, mais aussi dans les discussions, à Genève, en 1991, dans le cénacle mondial des obtenteurs. Les deux représentants des trieurs ont réussi à convaincre suffisamment de délégations nationales pour ne pas interdire la semence de ferme, ce qui déboucha sur sa légalisation en Europe en 1994. Mais il fallut attendre 2011 pour que le droit français l'enregistre." La profession aura donc vécu une vingtaine d'années dans une certaine clandestinité. C'est d'ailleurs dans ce contexte que Stéphane Jouatel a lancé son entreprise en 1999. "On me disait alors que j'allais faire ce métier pendant quatre ou cinq ans avant qu'il ne soit aboli." Aujourd'hui, l'entrepreneur basé dans le secteur de Conlie (à Cures), comptabilise 500 clients.
700 clients dans quatre départements
La famille Pelletier, elle, a commencé son activité en 1992 avec Daniel Pelletier et compte 700 clients en rayonnant sur quatre départements : la Sarthe, le Loir-et-Cher, l'Indre-et-Loire et l'Eure-et-Loir. Dans cette région du Centre-Ouest, avec ses trois machines, c'est l'une des plus importantes entreprises spécialisées dans le triage et le traitement de semences à la ferme. "Le nombre de clients augmente mais les volumes encore plus, souligne Thibault Pelletier. Un agriculteur fait une économie de 50 % par rapport aux semences certifiées. Un traitement lui reviendra à environ 400 euros/tonne et il économisera peut-être un fongicide car on fait du cas par cas. C'est toujours utile, notamment lorsque que l'on veut faire quelques économies après une mauvaise année de récolte comme l'an passé."
85 % de blé, 15 % d'orge
Thibault Pelletier et son équipe de salariés (trois à l'année qui travaillent aussi sur les vergers pour la cidrerie-distillerie Pelletier et deux saisonniers) trient à 85 % du blé et à 15 % de l'orge. A la Chapelle-Huon, Didier Bordeau (VL) ou Emmanuel Huger font partie de ses clients, nous confie t-il aux côtés de Philippe Lebert, maire de la commune. 85, c'est aussi le pourcentage du triage dans le chiffre d'affaires de l'entreprise. "Quand mon père a commencé l'activité, c'était juste en complément de l'alambic pour l'eau de vie, poursuit Thibault pour démontrer l'ampleur du développement de l'entreprise familiale. Aujourd'hui, on produit 60 000 quintaux par an." Sur son camion, le spécialiste transporte une station mobile de tri complètement autonome, qui permet de répondre aux différentes demandes des agriculteurs. La colonne densimétrique permet un tri des grains par écart de densité. "Les grains cassés ou les ray-grass qui auraient pu rester sont enlevés. Sans la colonne et avec seulement une aspiration et un trieur, on ne serait pas au top sur les adventices." La colonne permet aussi d'extraire les grains fusariés. En outre, les trieurs à façon accompagnent les agriculteurs dans la transition. "Une semence locale va mieux s'adapter à un climat local", affirme François Delaunay.