Jeunes Agriculteurs
À Saint-Georges-le-Gaultier, le préfet à l'écoute des JA
Lors de sa visite au Gaec Lait'Loges, le préfet Sébastien Jallet a échangé avec les JA Sarthe sur les défis agricoles du département, entre coût des installations, qualité de l'eau et perspectives de la Pac post-2027.




Fin septembre, les JA 72 ont accueilli le nouveau préfet, Sébastien Jallet, accompagné de Marc Séverac, directeur de la DDT, et Karine Proux, directrice de la DDPP, sur l'exploitation du Gaec Lait' Loges à Saint-Georges-le-Gaultier. Arrivé en Sarthe en juillet dernier, Sébastien Jallet n'était pas dépaysé par le relief vallonné des Alpes Mancelles, lui qui était auparavant préfet de l'Orne. Une visite qui a permis de mettre en avant les forces de l'agriculture sarthoise mais aussi ses fragilités.
Une exploitation représentative du territoire agricole
Le Gaec Lait'Loges, constitué de quatre associés - Émeline, Martine, Christian et Alex Denis- et d'un salarié, pratique la polyculture-élevage : 65 vaches laitières, 3 poulaillers Label Rouge "Duc de Mayenne" (pintades, chapons, poulets...), grandes cultures et transformation à la ferme.
Depuis 2018, un atelier transforme chaque année 50 000 litres de lait en yaourts, skyr, tomme et crème fraîche, tandis que 650 000 litres sont livrés à la laiterie LSDH (Laiterie de Saint-Denis-de-l'Hôtel). L'exploitation dispose de 105 ha de cultures et est certifiée HVE (Haute valeur environnementale) depuis 2025. "Nous avons fait le choix de diversifier nos ateliers et de transformer une partie de notre production pour mieux valoriser notre travail et répondre aux attentes locales", a expliqué Émeline Denis.
Eau et irrigation : une ressource sous tension
Durant la visite de l'exploitation, les échanges ont rapidement abordé la question cruciale de l'eau. Des études HMUC (Hydrologie, milieu, usage et climat) prévoient des baisses de volumes prélevables notamment sur le bassin de l'Argance (bassin versant de l'aval du Loir situé en Sarthe et en Maine-et-Loire). Ce secteur connait une tension sur la quantité d'eau. Le préfet s'est dit prêt à relancer les échanges avant la consultation publique de ces études.
La qualité de l'eau demeure aussi un sujet de préoccupation. " En Sarthe, le captage de Penvert est à la limite de la potabilité depuis plusieurs années. Il est nécessaire de travailler ensemble pour apporter des solutions " précise le préfet.
De son côté, Maxime Guimbreteau, président de JA Sarthe, a souligné l'impact des restrictions imposées suite à la contamination du Loir par la bactérie Ralstonia solanacearum, qui interdit l'irrigation des légumes (tomates, aubergines, piments, poivrons, pommes de terre) à partir de cette ressource (lire aussi p.8). Seul l'arrosage grâce à un forage ou un puits reste autorisé : "C'est tout un secteur agricole et maraîcher du Sud Sarthe qui est aujourd'hui fragilisé pour une durée indéterminée". Les services de l'Etat envisagent d'aider au financement de forages pour les exploitations concernées par le biais du fonds hydraulique. L'administration s'est par ailleurs dite ouverte à des projets de réserves d'eau pour le département.
Installations et filières sous tension : risque de décapitalisation !
Si la filière viande bovine bénéficie aujourd'hui de prix attractifs, avec un kilo de carcasse vendu presque deux fois plus cher qu'en 2018, le renouvellement des générations, lui, est en difficulté. " Le coût des installations explose et le prix des génisses a plus que doublé. Cette hausse menace l'installation des jeunes en système naisseur-engraisseur, déjà fragilisé par la FCO. Nous risquons une décapitalisation des troupeaux à terme faute de repreneurs ", alerte Alexis Vaugarny, vice-président JA Sarthe.
Côté lait, si le prix du lait avait progressé depuis plus d'un an, la FNPL et Sodiaal redoutent ces derniers jours une baisse des prix, alors que la France accuse déjà un retard sur ses voisins : -49 €/1 000 L par rapport à l'Allemagne, -93 € par rapport à l'Italie. Les éleveurs laitiers sarthois, qui n'ont pas été épargnés par la vague de FCO (perte en qualité de lait, retard de production...), rappellent qu'une baisse du prix du lait enverrait un mauvais signal pour l'installation des nouvelles générations. " Le lait reste pour beaucoup un rempart face aux aléas climatiques et à la volatilité des prix céréaliers ", souligne Vivien Courdoisy, trésorier JA 72.
Fiscalité et assurances : un besoin d'adaptation pour les jeunes installés
JA 72 demande un dégrèvement de la taxe foncière sur le non bâti (TFNB) pour les nouveaux installés. "Aujourd'hui, sans historique, les indemnisations d'assurance-récolte sont quasi nulles, ce dégrèvement pourrait apporter un souffle à ces jeunes" insiste Maxime Guimbreteau. Le directeur de la DDT a rappelé que la Commission européenne propose d'étendre la moyenne de référence de 3 à 8 ans pour le calcul des indemnisations, une mesure jugée indispensable face à la multiplication des aléas climatiques.
Pac et Mercosur : vigilance collective
Les JA ont réaffirmé leur attachement à une Pac post-2027 ambitieuse, avec 10 % du budget dédié au renouvellement des générations. Enfin, le préfet a rappelé la position constante de la France, opposée à l'accord Mercosur, tout en restant attentif aux évolutions des négociations.
Une rencontre constructive, qui a permis au préfet d'entendre les préoccupations des jeunes agriculteurs et de s'engager à poursuivre les discussions sur l'avenir de l'agriculture sarthoise.