Un livre pour garder
la mémoire rurale
la mémoire rurale
Maire de Ségrie, Francis Lépinette publie un livre sur l'histoire de son village face à la guerre de 1870.
Dans le nord de la Sarthe, le village de Ségrie est désormais réputé pour ses traditionnelles fête de la Gare et fête de la pomme, qui recréent les conditions de vie rurale d'antan. Une dynamique portée depuis 1989 par l'association des Bercons et son président Francis Lépinette, ancien instituteur passionné d'histoire et maire de la commune. L'édile vient de publier un ouvrage clôturant 4 ans d'enquête sur la vie des habitants de Ségrie avant, pendant et après la guerre de 1870.
Fête de la Gare et fête de la pomme
Francis Lépinette a tissé des liens étroits avec le milieu rural. Né à Neuvy-en-Champagne, installé à Ségrie en 1982, il a été instituteur pendant 41 ans dans des écoles de campagne. " J'ai commencé en classe unique. À l'époque, l'instituteur faisait la classe, la cantine, et même le centre aéré. " Il crée en 1989 l'association des Bercons, pour rendre hommage à ces collines peu fertiles mais données en terres franches (exemptes d'impôts) à la commune par une mystérieuse reine de France, la reine Berthe, au 12e siècle. " Le but de l'association est surtout de faire vivre notre village et ses traditions et fédérer les habitants qui ne se connaissent pas toujours. " L'association lance tout de suite les deux événements, dont la fête de la Gare portant sur un thème historique et qui mêle théâtre, son et lumières (en juillet), et la fête de la pomme qui met en avant les pratiques agricoles d'autrefois (en octobre). Au fil du temps, de nombreux costumes et décors ont été réunis et fabriqués par les bénvoles pour la fête de la Gare qui se tient sur le site de l'ancienne gare de marchandise de Ségrie. Des costumes ont été spécialement créés pour la commémoration des 150 ans de la guerre de 1870, ainsi qu'une ambulance hippomobile reconstituée, unique en France.
Comptabiliser les morts sarthois
Si la guerre de 1870 intéresse tant Francis Lépinette, c'est qu'elle a directement impacté Ségrie, comme beaucoup de communes sarthoises. " La bataille du Mans en janvier 1871 a été la dernière de cette guerre. Napoléon III a perdu en très peu de temps. Le 4 septembre, la République a été proclamée, mais les combats se sont poursuivis pendant 5 mois avec la 2e armée de la Loire du général Chanzy. Des régiments de gardes nationaux ont été levés pour rejoindre cette armée dont il ne restait que 20 % d'effectif. " Mais à l'époque les soldats n'ont pas de plaque et le nombre de morts n'a jamais été comptabilisé : Francis Lépinette lance une vaste enquête pour dresser la liste des morts par commune sarthoise. Le maire du Mans Stéphane Le Foll lui prête main forte en associant des étudiants à ce travail -cette liste de 4337 morts est consultable aux archives départementales. Ségrie recense 12 morts parmi sa population et le maire décide de leur rendre hommage à travers un livre.
Deux mois d'occupation par les Prussiens
C'est ainsi un vrai voyage dans le temps qui est proposé dans " Ségrie, un village sarthois face à la guerre de 1870. " S'appuyant sur des documents d'archive, Francis Lépinette dresse un portrait précis de sa commune avant la guerre, ses activités -95% des villageois étaient agriculteurs- en " donnant un nom " à chacun et en partant du maire de l'époque, René Fleurant Barbier. Le secteur situé en fin de Champagne conlinoise est riche de bonnes terres qui sont principalement cultivées en céréales. " Il y avait déjà à l'époque un premier exode agricole, avec la révolution industrielle ", souligne l'auteur qui ne manque pas d'anecdotes : " La culture du chanvre, dont le premier débouché est le secteur des voiles et cordages marins, s'effondre avec l'arrivée du bateau à vapeur et la concurrence du coton américain. "
Une quarantaine de Ségriens partent faire cette guerre dont les derniers combats se terminent chez nous. Le territoire est marqué par deux mois d'occupation, une fois l'armistice signée, avec son lot de réquisitions et d'exactions et, à la clé pour la France, la perte de l'Alsace et de la Lorraine. Une histoire locale, " vraie leçon pour notre époque ", transposable à de nombreux villages sarthois.