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Blé
Des semis en attente d’une éclaircie

Les semis de blé sont stoppés depuis trois semaines à cause d’une forte pluviométrie. En Sarthe, plus de la moitié des surfaces reste à implanter.

Depuis le 18 octobre, la pluie tombe sans discontinuer. Des conditions météo qui bloquent les semis des céréales. Les sols engorgés rendent en effet l’accès aux parcelles impossible. Hormis les agriculteurs ayant de petites surfaces à implanter et ceux qui sèment début octobre,  tous attendent quelques jours d’accalmie pour continuer les chantiers. Selon les secteurs, les semis sont plus ou moins avancés en ce début du mois de novembre. Jean-Pascal Maudet, directeur du négoce Maudet (Beaumont), qui maille le territoire sur sept sites dans le Nord Sarthe sur une bande de 70 km d’est en ouest n’a pas donné de nouvelles rassurantes. « Pas plus d’un tiers des semis a été fait. Cela me rappelle l’année 2019 avec un automne très pluvieux également. C’est inquiétant pour ceux qui n’ont pas commencé du tout. S’il le font en décembre ou même plus tard, il y aura de sérieux problèmes de rendement. » Basé au centre du département, à Allonnes, Eric Chevalier avait décidé de semer tôt, le 7 octobre, « dans la poussière ». Bien lui en a pris. Ses 40 hectares de blé ont été bouclés voici plus de quinze jours. « Le désherbage attendra car le sol ne porte pas mais je ne suis pas à plaindre par rapport à des collègues de Fillé-sur-Sarthe, qui n’ont pas commencé car les terres sont trop profondes, sur les bordures de rivière. Il y a de la flotte sur la terre. » Dans le secteur de Louplande et la Suze/Sarthe, Jean-Baptiste Dumont, technico-commercial d’AMC, évoque entre 40 à 50 % de semis commencés. « Certains ont forcé sur certaines parcelles mais ont repris de la pluie derrière. Cela va être à refaire sur les plus humides. Ils vont essayer de ressemer jusqu’à fin novembre, début décembre. Après, ce sera trop tard, comme en 2019. Plus au sud, du côté de Malicorne, mon collègue m’a dit qu’ils étaient logés à la même enseigne : c’est très inégal. Certains ont terminé, d’autres sont à la moitié ou n’ont pas encore commencé. 2024 est mal engagé pour les céréales d’hiver. » Et des précipitations sont encore annoncées à partir de dimanche et pratiquement toute la semaine prochaine. Le contraste est forcément saisissant avec le maïs. « Heureusement que les récoltes de maïs ont été très bonnes autant en quantité qu’en qualité. On a battu sec avec une humidité entre 18 et 25. C’est assez rare pour le souligner. » Les fortunes sont diverses en cette fin d’année… Selon les conseillers agronomiques de la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire, cette situation n’est pas dramatique. « En 2019, des semis ont été réalisés jusqu’en janvier, rappelle Alexandre Gourvennec. L’essentiel est surtout d’attendre que les sols soient bien ressuyés avant d’entrer dans les parcelles ». Au-delà de la mi-novembre, il y a certes un risque de perte de rendement à la récolte. « Mais il est possible d’augmenter la densité de semis, passant de 250 à 280 gr/m2 », recommande-t-il par exemple. « Ou encore de changer de variétés pour s’orienter vers une plus précoce », suggère Jonathan Chesné. Le travail du sol devra également être adapté, privilégiant le labour selon l’état de la parcelle. Si la météo ne s’améliore pas ces prochaines semaines, reste la solution de ne pas semer du tout. « Plutôt que de mal implanter les céréales, peutêtre faut-il envisager directement de semer des cultures de printemps », souffle Jonathan Chesné. Une décision que prendront plus facilement les céréaliers que les éleveurs. « J’ai besoin de paille pour mon troupeau allaitant, souligne Laurent Véron. Peut-être que je ferai moins que les 40 ha de blé prévus dans mon assolement ». Pour les parcelles déjà semées, les conséquences de ces intempéries dépendent du stade actuel de la culture. « Les blés qui  ont déjà une ou deux feuilles devraient s’en sortir, juge Jonathan Chesné. Mais il y a un fort risque de perte de pieds pour les plantes tout juste levées ». Par ailleurs, faute d’intervention possible, le risque de développement de maladies, comme la JNO, est élevé dans les parcelles infectées par les pucerons. Enfin, sauf si le désherbage a été réalisé au moment du semis, le salissement des parcelles en sortie hiver sera trop important pour être maîtrisé. 

AVEC DELPHINE GROSBOIS

 

Les conseils d’Arvalis-Institut du végétal 

Lors d’un webinaire sur la conduite des céréales à paille, mercredi 8 novembre, Arvalis- Institut du Végétal s’est voulu plutôt rassurant sur la situation des semis : si l’on compare à 2019, année où il avait plu tout l’automne sans discontinuer, les agriculteurs ont eu une « petite fenêtre de tir » jusqu’à la mi-octobre. Et pour ceux qui n’ont pas encore semé, « jusqu’en fin décembre, il n’y a pas trop à se préoccuper de l’alternativité des variétés », a expliqué Anne-Monique Bodilis, ingénieure régionale Arvalis. Mais il sera nécessaire d’adapter la conduite en compensant le défaut de tallage par une augmentation des densités de semis. Jusqu’à fin novembre, voici ce qui est recommandé selon les sols : en limons sains et limons drainés, 260 grains/m2 en bonnes conditions, 290 grains/ m2 en conditions difficiles (sol battant, préparation motteuse, sol insuffisamment ressuyé...) ; en limons hydromorphes et sols superficiels, 340 grains/m2 ; en sols argileux, 350 à 380 grains/m2.  La perte de potentiel de rendement en semis tardif est très dépendante des conditions d’implantation : en moyenne de 6 quintaux, elle peut osciller entre 0 et 23 quintaux, a calculé Arvalis. Pour le désherbage, Anne-Monique Bodilis recommande « d’attendre quelques jours après ressuyage complet dans les parcelles ayant baigné ». Sans quoi, on s’expose à des risques de phytotoxicité. L’organisme recommande de revoir les programmes de désherbage si le stade des adventices dépasse les 3 feuilles, en associant des produits racinaires et foliaires.   S.H. 

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